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CorpsHumain.ca |
Le toucher |
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Généralités.Le toucher est probablement le sens le plus stimulé et auquel nous accordons le moins d'importance. Que ce soit la poignée de main, la caresse du vent, le poids de vos vêtements ou les points de pression sous vos pieds lorsque vous marchez, le sens du toucher est constamment sollicité. Ce sens comporte plusieurs aspects, il nous permet à la fois de connaître la texture et la température d'un objet, et d'ajuster notre démarche si nous marchons sur un caillou. Nous pouvons classifier le toucher (ou les sensations somatiques) par rapport aux types de récepteurs impliqués: 1) les sensations mécaniques liées au déplacement de tissus, 2) les sensations thermiques pour détecter le chaud et le froid, et 3) les sensations de douleurs liées à la fatigue ou la destruction tissulaire. Et les sensations mécaniques quant à elles peuvent se diviser en sensations extéroceptives (qu'on perçoit à la surface du corps) et sensations proprioceptives (plus ou moins inconscientes, elles nous renseignent sur la position de notre corps dans l'espace, l'équilibre, les sensations viscérales et des tissus profonds). |
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Un cube dans la main. Un vidéo sur le sens du toucher. |
Bien que je vais décrire ces différentes catégories, le plus souvent ces 'sens du toucher' sont tous sollicités à la fois. C'est l'intégration de ces informations, au niveau du système nerveux central (cerveau et moelle épinière), qui nous renseigne vraiment sur la nature du toucher. Je ferme les yeux et je sens un objet dans ma main. Les récepteurs de ma peau distinguent les arêtes et les coins d'un cube. Je peux en apprécier sa texture et sa température. La tension que je dois mettre dans les muscles de mes doigts, ma main et mon bras pour contrer la gravité, me renseigne sur la grandeur et le poids du cube. Si je le tiens suffisamment longtemps, la douleur de mes muscles me rappellera leurs degrés de fatigue et leurs besoins en nutriments et oxygène. Mais tant que je n'ouvre pas les yeux, je ne peux connaître sa couleur ou s'il est lumineux, par exemple. |
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Sensations extéroceptives.Dans la peau, il y a une foule de récepteurs qui servent à sentir les choses. Chaque type de récepteur a sa spécialité et, ensemble, ils contribuent souvent à une sensation unique. |
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Des terminaisons libres non myélinisées, donc dépourvues d'isolation s'infiltrent entre les cellules du derme. Ils ont pour fonctions de transmettre l'information thermique et de douleur. D'autres terminaisons libres peuvent s'enrouler autour de racines de poils et participent aux sensations de toucher (la mécano-réception). Certaines terminaisons libres se retrouvent dans les couches plus profondes de l'épiderme des surfaces palmaires des mains et plantaires des pieds. Ces terminaisons sont attachées à des cellules épithéliales modifiées qu'on nomme cellules de Merkel et participeraient également à la mécano-réception. Les corpuscules de Pacini sont localisés dans le derme et autres tissus sous-cutanés. Mais, on les retrouve plus particulièrement au niveau des doigts, des organes génitaux et des seins. Ils ont de 1 à 4 mm de long et de 0.5 à 1.0 mm de diamètre. La fibre nerveuse centrale est démyélinisée et est entourée de cellules aplaties et disposées de façon concentrique. Ce sont des mécanorécepteurs qui transmettent les déformations engendrées par des pressions. Ils s'adaptent rapidement et par conséquent ils détectent surtout le mouvement. Aussi, ils peuvent répondre aux vibrations, et on les retrouve également à d'autres endroits subissant des déformations telles que dans les capsules articulaires et la paroi de la vessie. Les corpuscules de Ruffini sont petits et allongés, ils font environ 1 mm de long par 0.1 mm de diamètre. Ils sont situés profondément dans le derme et ressemblent beaucoup aux récepteurs localisés dans les tendons et qui mesurent leur étirement. Ils renseignent probablement sur l'état d'étirement de la peau. Leur signal, plutôt persistant, informe sur l'état statique des choses. Les bulbes de Krause sont de petits corpuscules situés dans le derme de tissus muqueux tel dans le blanc de l'oeil, les paupières, la langue et les muqueuses génitales externes. Ils seraient également des mécanorécepteurs. Enfin, les corpuscules de Meissner sont de petits mécanorécepteurs surtout localisés dans les régions de grandes sensibilités tactiles et peu poilues telle que la surface palmaire des doigts, la plante du pied, les paupières, les lèvres, les régions génitales externes et le mamelon des seins. Ces récepteurs sont localisés près de la surface de la peau, à la jonction du derme et de l'épiderme. Ils sont très sensibles et pourraient être impliqués dans la détection des textures. |
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Les corpuscules de Pacini, Ruffini et Meissner envoient leurs informations à des vitesses de 30 à 60 mètres/sec, via de grosses fibres myélinisées. La plupart des terminaisons libres quant à elles, et celles associées aux poils, utilisent de plus petites fibres myélinisées pour transmettre leurs informations à une vitesse de 6 à 15 mètres/sec. Ces récepteurs transmettent aussi les vibrations. Les plus rapides tels les corpuscules de Pacini permettent de distinguer des vibrations jusqu'à 400-500Hz. Mais d'autres, comme les corpuscules de Meissner, qui s'adaptent moins rapidement, répondent mieux aux vibrations de moins de 80Hz. |
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Sensations proprioceptives.La proprioception est la perception de son corps dans l'espace; pas nécessairement au sens de la conscience. Plutôt inconsciemment, notre cerveau connait l'état de contraction de tous nos muscles et l'état de flexion de toutes nos jointures. Il peut se servir de ces informations pour coordonner les mouvements et les réflexes, et pour maintenir l'équilibre. Bien qu'essentielle, la proprioception ne peut à elle seule maintenir l'équilibre du corps et coordonner ses mouvements. Il faut aussi l'information visuelle et celle de l'équilibre (canaux semi-circulaires de l'oreille interne) qui sont intégrées au niveau du cerveau et surtout du cervelet, avec l'information proprioceptive, afin de percevoir et contrôler notre corps dans l'espace. |
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Organe tendineux de Golgi. Réflexe rotulien. |
Il y a en effet de ces récepteurs qui sont spécialisés dans la détection du degré d'étirement des muscles et des tendons. Dans la capsule articulaire, on trouve beaucoup de corpuscules de Ruffini qui sont stimulés par le mouvement de l'articulation. Dans les tendons, il y a des récepteurs spécialisés, les organes tendineux de Golgi (ou organe de Golgi), qui consiste en de multiples ramifications nerveuses interlacées à des fibrilles de collagène élastique. L'étirement de la fibre tendineuse, et donc de l'organe de Golgi, stimule la fibre nerveuse afférente qui transmet l'information jusqu'à la moelle épinière. Si on mesure l'activité électrique de certains de ces récepteurs, on constate qu'ils ne répondent pas tous aux mêmes angles de rotation de l'articulation. Par exemple, certains récepteurs auraient une activité prononcée lorsque l'articulation e st à 60 degrés et serait silencieux autrement; d'autres seraient plutôt réglés pour répondre à150 degré. Dans les muscles, certaines fibres musculaires sont spécialement modifiées pour recevoir un enroulement de terminaisons nerveuses, formant ainsi un réseau de fuseaux neuromusculaires. L'état d'étirement ou de contraction des muscles est relayé à la moelle épinière et au cerveau et, s'il doit y avoir correction, la réponse motrice revient par les fibres efférentes pour ajuster la contraction musculaire. Fuseau neuromusculaire. La proprioception est aussi très importante pour les réflexes. Que se passe-t-il quand le docteur vous tape sur le genou avec son petit marteau? Il vous demande de mettre votre jambe en demi-flexion et votre cerveau enregistre cette directive. Puis il tape sur votre tendon du genou ce qui a pour effet de l'étirer. Cet étirement, comme si le genou était plié plus que supposé, est perçu immédiatement au niveau de la moelle épinière dorsale. Ce signal passe par un court interneurone qui en retour excite un long motoneurone qui émerge de la corne ventrale de la moelle épinière et innerve les muscles de la cuisse. La contraction réflexe des ces muscles provoquera une extension de la jambe, comme pour rétablir le bon degré de flexion. Ces réflexes qui servent à maintenir l'homéostasie (maintien d'un état stable) du corps se passent si vite que le cerveau est informé du changement bien après que ces réflexes aient rétabli la situation. |
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Sensations thermiques.Trois types de récepteurs participent à transmettre les sensations de température: récepteurs du chaud, du froid et de la douleur. Mais les récepteurs de la douleur ne sont activés qu'à des froids ou des chaleurs extrêmes. |
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Réponse neuronale aux variations de température. |
En dessous de 10°C, ce sont les récepteurs de la douleur qui sont activés. à partir de 10 à 15°C, la douleur cesse et les récepteurs du froid s'activent. Entre 25 et 35°C, la zone de confort, les récepteurs du froid diminuent leur activité et ceux du chaud s'activent. Au dessus de 45°C, l'activité des récepteurs de chaleur cesse et celle des récepteurs de douleur augmente. L'activité de ces récepteurs de température dépendrait de la vitesse des réactions biochimiques qui elles-mêmes dépendent de la température. Pour chaque variation de 10°C, la vitesse des réactions chimiques intracellulaires varie de ±2.3 fois. Mais la transmission de la sensation de température n'est pas un phénomène purement linéaire; c'est beaucoup plus complexe. Ces récepteurs ont aussi la faculté de s'adapter, au moins partiellement, en une trentaine de secondes de sorte que lorsque la température de la peau est changée mais maintenue stable, la perception de réchauffement ou de refroidissement s'atténue avec le temps. Cette adaptation thermique nous permet de mieux affronter les changements environnementaux. Aussi, le nombre de récepteurs thermiques affecté par un changement de température est très important pour définir le degré de précision avec lequel nous pouvons détecter ces changements. C'est un phénomène de sommation spatiale: plus il y a de cellules stimulées, plus il est possible d'obtenir de précision (une échelle de 1 à 10 est moins précise qu'une échelle de 1 à 100). Si nous sommes complètement immergés, des variations aussi faibles que 0.01°C peuvent être détectées alors que si ces variations n'affectent que 1cm carré de la peau, des variations allant jusqu'à 1.0°C pourraient être requises avant que le sujet perçoive le changement de température. |
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La douleur.La douleur c'est d'abord et avant tout un mécanisme de défense. Elle déclenche un réflexe approprié lorsque notre main frôle ou touche une source de chaleur intense et elle nous permet, par exemple, d'identifier différents maux de digestion. Il y a différents types de douleur: les douleurs aiguës et localisées comme un pincement ou une coupure, les brulures et les douleurs diffuses (qui ne sont pas localisées en un point précis: comme les maux de tête, les douleurs aux muscles ou celles à l'estomac). Mais on pourrait dire qu'il y a aussi les douleurs pulsatiles, lancinantes, les crampes, les nausées, les douleurs électriques et combien d'autres descriptifs? Il est difficile de toujours bien décrire la douleur car il y a plusieurs mécanismes impliqués dans sa perception. Il est donc difficile de mesurer, de comprendre, la douleur, nous ne pouvons que nous instruire des résultats de tests spécifiques utilisant différentes modalités pour induire de la douleur et en mesurer son intensité. |
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Un test pour déterminer un seuil de douleur. Relation Intensité vs Durée d'une Perception. |
On peut mesurer la douleur en piquant la peau avec une aiguille ou en l'exposant à la chaleur. On peut mesurer le seuil de détection de la douleur (une définition du seuil pourrait être l'intensité d'un stimulus qui déclenchera, une fois sur deux, une réponse douloureuse). On peut aussi mesurer l'intensité de la douleur (qui permet de distinguer des changements d'intensités à peine perceptibles), sa durée et sa localisation ou son étendue. Mais, il ne faut jamais oublier que toutes ces mesures sont subjectives et sont effectuées sur des sujets qui ont différentes résistances à la douleur (on le sait bien, les gars sont plus 'tough' que les filles ;-)). Une façon de décrire le seuil de la douleur est de le faire à différentes intensités et différentes durées de stimulus. Par exemple, on peut, à l'aide d'une lampe et d'une lentille, produire un point chaud sur le front d'un sujet. On peut varier l'intensité (la force de la lampe) et la durée du stimulus. Dans ce cas on obtient une relation asymptotique montrant qu'il faut une courte stimulation de forte intensité pour induire de la douleur, alors que si l'intensité du stimulus est plus faible, il faut qu'il soit appliqué pour une plus longue durée pour qu'il soit perçu comme douloureux. Avec ce test on considère que le seuil correspond au stimulus minimum qui, lorsqu'appliqué pour une longue période, engendrera de la douleur; c'est la valeur de l'asymptote parallèle à l'axe des Xs. Cette détermination du seuil semble fiable et a permis de démontrer, en autre, que presque tout le monde a le même seuil de douleur à la chaleur, soit 45C sur la peau. Cependant, tout le monde ne réagit pas de la même façon face à la douleur, et même face aux différents types de douleurs. Dans une expérience semblable, on a voulu déterminer le plus petit changement possible, dans l'intensité du stimulus, qui pourra être perçu comme un mal d'une différente intensité. Ainsi, on a déterminé, dans ce cas-ci, qu'une personne pouvait en moyenne distinguer 22 niveaux de douleur entre une douleur à peine perceptible et une douleur qu'on ne peut plus endurer. |
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Les récepteurs de la douleur (les terminaisons libres non myélinisées) n'adaptent pas leur activité électrique lorsqu'ils sont stimulés. Ceci veut dire que la perception de la douleur ne s'atténue pas avec le temps. Par exemple, tant que des dommages tissulaires seront présents, la douleur persistera et nous allons être portés à faire plus attention. Même que parfois, comme dans le cas de douleurs inflammatoires, le seuil d'activation des récepteurs s’abaisse au fur et à mesure que la stimulation persiste et la douleur devient ainsi de plus en plus pénible. Cette augmentation de la sensibilité se nomme: l'hyperalgésie. Lors de destruction cellulaire, toute sorte de molécules peuvent être impliquées dans la transmission et la perception de la douleur. Les déchets tissulaires, le manque d'oxygène et/ou l'accumulation d'acide lactique causée par un spasme musculaire produisent également de la douleur. |
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Les voies centrales.Toute l'information sensorielle du toucher (excluant donc la vue, l'ouïe, l'odorat et le gouter) entre dans le système nerveux central par les cornes dorsales de la moelle épinière. Le corps cellulaire des afférences sensitives est situé dans les ganglions spinaux (DRG=Dorsal Root Ganglia en anglais), et leurs axones entrent par les cornes dorsales. Au niveau du système nerveux central, on distingue principalement deux voies de transmission de l'information: le système de la colonne dorsale (la voie lemniscale) et la voie spinothalamique. Voici quelque une de leurs caractéristiques.
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La voie lemniscale. Homonculus sensoriel. La voie spinothalamique. |
Dans la voie lemniscale, ou la voie sensitive de la colonne dorsale, les axones (de premier ordre) des mécanorécepteurs et propriorécepteurs entrent par la racine dorsale de la moelle épinière. à ce niveau, l'axone donne naissance à un axone collatéral qui pourra participer aux réflexes spinaux, et poursuit sa route dans un cordon dorsal vers des noyaux dorsaux du bulbe rachidien où il fera synapse avec un neurone du deuxième ordre. Ce neurone de second ordre décusse immédiatement de l'autre côté du bulbe rachidien et remonte jusqu'au thalamus par la voie lemniscale médiale. Dans cette voie, se joignent également les afférences du trijumeau, responsable des perceptions sensorielles provenant de la face et de la tête. Le fait que ce neurone du second ordre décusse de l'autre côté du système nerveux signifie que l'information somatosensorielle provenant du côté gauche du corps sera analysée par notre cerveau droit, et vice-versa. Du thalamus, un neurone de troisième ordre émerge et se dirige vers le gyrus postcentral du cortex cérébral; le cortex somatosensoriel. Toutes ces fibres du système somatosensoriel montent vers le cortex sensoriel de façon organisée (organisation somatotopique). De sorte que les fibres provenant du bas du corps se retrouvent plus près du centre de la moelle épinière et que celles provenant du haut se retrouvent plus latéralement. Ainsi, il en résulte une certaine organisation au niveau du cortex somatosensoriel. On nomme cette organisation somatosensorielle, l’homoncule (illustrer ci-contre). Cette représentation de notre corps nous montre que la face et la main envoient beaucoup d'informations sensorielles au cortex comparativement aux bras et aux jambes qui ont une représentation moins importante. Cette organisation somatotopique suggère une organisation linéaire entre les récepteurs périphériques et le cortex sensoriel. Mais, il ne faut pas oublier qu'il y a trois niveaux de neurones impliqués dans la transmission du signal, avec des relais au niveau du bulbe rachidien et du thalamus. à chaque relai il y a convergence des signaux pour augmenter la fiabilité de transmission de l'information (amplitude). Il existe également un système d'inhibition latérale entre les fibres sensorielles; c'est cette capacité qu'a un neurone excité, d'inhiber son voisin et ainsi augmenter la discrimination entre deux points (le signal le plus fort l'emporte et est mieux localisé). Convergence et inhibition latérale. La voie spinothalamique, quant à elle, transporte l'information qui ne requière pas une transmission aussi rapide et précise: elle transporte la douleur, le chaud et le froid, et les sensations sexuelles. Comme pour la voie lemniscale, les fibres sensorielles de la voie spinothalamique entre la moelle épinière par la corne dorsale et peuvent immédiatement monter ou descendre de quelques segments de moelle avant de faire connexion avec un neurone de deuxième ordre. Ce neurone de second ordre décussera de vers les régions ventrale et latérale de l'autre côté de la moelle épinière puis remontra jusqu'aux noyaux thalamiques. Finalement, un neurone de troisième ordre relaie l'information vers les cortex sensoriels primaire et secondaire. |
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